Sclérose en plaques : une origine mystérieuse
Environ 80 000 personnes sont touchées par la sclérose en plaques en France, deux millions dans le monde. C'est la deuxième source de handicap neurologique chez les adultes jeunes derrière les accidents de la route. Bien que relativement fréquente, cette maladie reste mal comprise.
Sclérose en plaqueDrôle de nom que celui de sclérose en plaques. En réalité, le terme de "sclérose" tire son origine du fait que cette maladie entraînerait un "durcissement" des zones du cerveau ou de la moelle épinière. Ces lésions nerveuses sont en rapport avec la destruction de la myéline, la substance qui forme la gaine protectrice entourant le prolongement des neurones ou axones. Ces altérations ne se font pas régulièrement mais par plaques et les symptômes, qui découlent du ralentissement de l'influx nerveux, sont donc très variables d'un malade à un autre. Au début de la maladie, les lésions peuvent se réparer et la maladie évolue insidieusement sous forme de poussées laissant dans un premier temps peu ou pas de séquelles.
L'utilisation de l'imagerie par résonance magnétique (IRM) et les études de microscopie ont révélé que la sclérose en plaques s'accompagne assez rapidement d'altérations des axones, responsables de la conduction nerveuse. Ces lésions interviennent probablement dans le handicap permanent qui se développe souvent après quelques années d'évolution de la maladie.
Un gradient Nord-Sud de la maladie
La sclérose en plaques est deux à trois fois plus répandue chez les femmes que chez les hommes et débute le plus souvent entre 20 et 40 ans. Une enquête, entreprise à l'hôpital Pasteur de Nice auprès de 411 patients en 2000 et 2001 a ainsi révélé que l'âge moyen de sa survenue est de 33 ans dans notre pays. La fréquence de la maladie est estimée à 1 pour 1 000 en France et décroît des pôles vers l'équateur. L'influence de paramètres environnementaux et individuels est suspectée dans sa survenue. Les facteurs environnementaux n'agiraient pas de la même manière en fonction de l'âge des malades. Le suivi de personnes ayant migré d'Europe de l'Est en Israël a montré que si le changement de pays se produit avant l'âge de 15 ans, les migrants sont soumis au risque assez bas de sclérose en plaques observé au Moyen-Orient. Au contraire, après l'âge de 15 ans, ils sont exposés au risque plus élevé, de leur contrée d'origine.
La maladie n'est pas génétique au sens classique du terme, car un seul gène n'est pas responsable de son apparition. Seuls 5 à 10 % des malades sont porteurs d'antécédents familiaux. Des facteurs de prédisposition génétique sont suspectés. Par ailleurs, un vrai jumeau a une chance sur quatre d'être touché lorsque son frère (porteur d'un patrimoine génétique strictement identique) est atteint alors que cette probabilité ne dépasse pas 3 % chez les faux jumeaux.
Une origine virale ?
Diverses anomalies du système immunitaire sont observées chez les malades. On a noté par exemple des modifications de l'équilibre entre les différentes cellules de l'immunité (lymphocytes) et une augmentation de la production de certains anticorps, notamment ceux dirigés contre la myéline.
L'hypothèse la plus vraisemblable, explique le Pr. Catherine Lubetzki, spécialiste de la sclérose en plaques à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière de Paris est "que la prédisposition à cette maladie met en jeu un très grand nombre de gènes dont le poids est individuellement faible. Chez certains individus présentant un terrain de susceptibilité, un événement déclenchant (peut-être une infection virale) pourrait contribuer à l'apparition d'une réaction auto-immune développée contre la myéline. On suppose que certains éléments de l'enveloppe du virus partageraient des similarités avec la myéline et seraient reconnus à tort comme étrangers par le système immunitaire (théorie du mimétisme moléculaire). Mais, il ne s'agit que d'une possibilité. On pense d'ailleurs que différents virus pourraient, en réalité, déclencher cette réaction auto-immune dès lors qu'ils interviennent dans un organisme prédisposé".
A la recherche du virus déclenchant
Cependant, bien des inconnues demeurent. En effet, en dépit de nombreux travaux développés sur des modèles expérimentaux de sclérose en plaques, il n'a pas été possible de prouver la responsabilité d'un agent infectieux quelconque dans la genèse de la maladie. Ainsi, impossible d'accuser le virus de la rougeole et des oreillons ou plus récemment les virus du groupe herpès, un temps suspectés.
En 1992, l'équipe d'Hervé Perron à Grenoble a identifié la présence d'un fragment de rétrovirus chez une patiente victime de sclérose en plaques. Mais depuis, cette découverte n'a pas été confirmée.
Quoi qu'il en soit, les personnes en contact avec les patients peuvent se rassurer. La sclérose en plaques n'est jamais contagieuse.
Vaccination anti-hépatite B : pas d'inquiétude
Quelques scléroses en plaques sont apparues chez des personnes jeunes vaccinées contre l'hépatite B. "Toutefois, même si l'on ne peut formellement écarter un facteur de susceptibilité individuelle, aucun élément de la littérature internationale ne permet d'apporter d'argument en faveur de la responsabilité de ce vaccin", précise le Pr. Catherine Lubetzki. Ainsi, "une étude américaine n'est pas parvenue à mettre en évidence une augmentation de fréquence de la maladie chez un groupe d'infirmières vaccinées. De plus, une étude européenne a conclu à l'absence de relation entre cette vaccination ou d'autres, et la survenue de poussées chez des patients atteints de sclérose en plaques".